ESTACADE DE VIGNOC (35)
UNE PASSERELLE EN BOIS LOCAUX POUR VALORISER L'ENTREE DE LA COMMUNE
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Pour requalifier son entrée de bourg, Vignoc, commune de 1 850 habitants située au Nord de Rennes, a édifié une passerelle de 120 mètres entièrement en bois locaux. L’ouvrage, désormais emblématique, démontre l’engagement de la collectivité en faveur du développement durable et de l’animation d’une filière économique régionale.
Livraison : 2015 . Surface : 120 ml Maître d’oeuvre : Cabinet Bourgeois (35) PRODUITS BOIS VALORISES /// CHÊNE & ROBINIER-FAUX-ACACIA STRUCTURE : Robinier-faux-acacia PLATELAGE : Chêne GARDE CORPS : Chêne
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©Jérôme Bachet |
Une passerelle qui sorte de l’ordinaire : c’est ce que souhaitait Vignoc pour son entrée de bourg. Jouxtant la route, l’estacade est dédiée au passage des piétons et des vélos. A cette dimension utilitaire a été associée une volonté de requalification architecturale : « Longue de 120 mètres, la passerelle en encorbellement surplombe un petit vallon en zone humide, qui abritait jadis une activité agricole tombée en friche », explique Aude Pélichet, ancienne Adjointe au maire, déléguée à l’urbanisme. Nous voulions revaloriser cet espace rural grâce à un ouvrage emblématique ».
Pascal Le Barbenchon, Architecte à l’Atelier du Canal, cabinet qui a assuré la maîtrise d’oeuvre, le souligne également : « il s’agit d’une réalisation d’importance, dernière phase d’un vaste programme d’aménagement du centre-bourg et de la ZAC, qui possède une véritable valeur paysagère et redonne un sens urbain à la voie d’accès ».
LE BOIS LOCAL, UNE VOLONTE DE LA MUNICIPALITE
Pour la réalisation de l’estacade, le choix du bois s’est, selon Aude Pelichet, « vite imposé comme une évidence » : « Nous adhérons à la charte de l’association Peuples des forêts primaires et avions la volonté d’aller au-delà de la protection des écosystèmes tropicaux, en promouvant un matériau de proximité. Le bois présente par ailleurs l’avantage de concilier légèreté et résistance mécanique : il ne détériore pas le sol, sensible et pentu ». Vignoc a été, dès le début de son projet, soutenue par le Réseau Bruded, dont elle est membre avec quelques 130 autres collectivités bretonnes. « Nous accompagnons les élus désireux de s’engager dans une action de développement durable, en mettant en oeuvre des solutions innovantes, indique Mikael Laurent, Chargé de développement de l’association. Nous avons travaillé avec la municipalité à la définition et au phasage de l’opération. Elle exprimait trois principales exigences : connaître le lieu d’approvisionnement du bois, utiliser des produits non traités et participer à l’animation d’une filière locale. Nous l’avons aidée à concrétiser ses attentes, en lui apportant retours d’expériences, conseils et regard extérieur ». |
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©Jérôme Bachet |
MOBILISER LE RESEAU REGIONAL DES TRANSFORMATEURS
Pour bénéficier d’une connaissance pointue du matériau, la collectivité a été orientée par Bruded vers Abibois, association interprofessionnelle bretonne. Conseillère construction bois, Audrey Borgeais a, dans un premier temps, « fait le point sur les besoins de la commune en matière de bois locaux. Quelle définition en donnait-elle ? S’agissait-il de bois bretons, d’essences indigènes ? Au regard des objectifs de la maîtrise d’ouvrage mais également de l’offre disponible, nous cherchons à déterminer le circuit le plus localisé possible ».
La traduction des attentes de la collectivité dans les pièces écrites des marchés est un exercice complexe. « Nous ne souhaitions pas seulement un approvisionnement en matériau : l’emploi de bois locaux était une exigence, affirme Aude Pélichet. Si la loi interdit d’indiquer dans les pièces écrites une provenance particulière, elle autorise néanmoins certaines formules qui permettent d’utiliser, comme l’indique Audrey Borgeais, qui a accompagné la maîtrise d’ouvrage dans la rédaction des CCTP, « les bonnes essences au bon endroit, avec une résistance mécanique adaptée ».
BOIS LOCAL ET MARCHE PUBLIC
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Organisées en réseau dans le cadre de l’action de BOIS d’Ici, les scieries régionales ont pu rapidement répondre à l’appel d’offres pour fournir les essences sélectionnées. « Des essences naturellement durables, avec une classe d’emploi de niveau 4, pour un usage en zone humide, précise Olivier Bouchet, Directeur commercial de Grouazel. L’entreprise de transformation, lauréate du marché, s’approvisionne presque exclusivement en bois du Grand Ouest. Le robinier-faux-acacia, a été employé pour les pilotis de la passerelle, en contact avec le sol, tandis que le chêne a servi au platelage ainsi qu’aux balustres et mains courantes ». | ||
Stock de chêne à la scierie Grouazel (35) |
ANTICIPATION ET PRECISION DANS LA MISE EN OEUVRE
Avec ses 40 travées et ses pilotis, la passerelle a fait l’objet d’une grande précision lors de la mise en œuvre. « Elle serpente sur plus de cent mètres : il y avait un rythme à trouver pour adapter l’ouvrage à son milieu, assurer les détails de raccordement», explique Pascal Le Barbenchon. L’Atelier du canal a travaillé en étroite collaboration avec SLE, société spécialisée dans les ouvrages d’extérieur en bois, qui intervenait pour l’occasion en sous-traitance de l’entreprise générale, Eiffage. Responsable de l’opération, Willy Plard souligne : « Avec le bois, l’anticipation est la condition du succès. Nous assurons une phase d’étude importante et livrons de véritables plans d’exécution. Les quarante portiques ont été préfabriqués dans nos ateliers, les autres éléments montés sur place, sans que la circulation routière ne soit suspendue pendant la durée du chantier ».
©Jérôme Bachat
SLE, d’ailleurs, remarque sur ses marchés une demande plus forte en produits de proximité : «aujourd’hui, les craintes s’expriment davantage sur la provenance des matériaux exotiques que sur la durabilité des bois locaux, utilisés depuis des siècles et qui ont largement fait leurs preuves. Ils sont en revanche de plus petites sections : le dimensionnement est une contrainte à prendre en compte au moment de la conception ».
ENTRE TRADITION ET INNOVATION
Utiliser pour des ouvrages publics des bois locaux reste cependant une démarche originale. « Nous n’avions pas conscience d’être à ce point précurseurs ! », sourit Aude Pelichet. La commune a tenu à pousser plus loin la logique de proximité en construisant un abri de bus avec des grumes de châtaignier exploitées dans une haie communale, au cœur d’un lotissement de Vignoc. « Elles ont été débitées sur place. Les poteaux et planches ont ensuite été assemblés sur chantier, 500 mètres plus loin, par l’association Des hommes et des arbres ». Une action culturelle et patrimoniale, qui se voulait aussi une forme de revendication : « Nous voulions démontrer que ce châtaignier de talus est aptes à faire autre chose que du bois de chauffage : il peut être utilisé en bois d’œuvre, comme le faisaient nos aïeux ». |
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©Jérôme Bachet |
DEPUIS, LA COLLECTIVITE CONTINUE SUR SA LANCEE !
Abibois a été à nouveau sollicité pour activer le réseau des scieries régionales. Elles devaient, cette fois, fournir des demi-rondins de châtaignier pour aménager les abords de la mairie. Vignoc, avec l’association BRUDED, organise également des visites de ses aménagements : l’occasion de faire partager à d’autres son expérience des bois locaux.
Pour visualiser d'autres photos et avoir des informations sur la scierie Grouazel, consulter la fiche du projet.: ICI